Le récit d’un marin indien qui avait fait naufrage sur une île isolée au nord de l’Australie pourrait fournir la clé de l’un des plus grands mystères de l’histoire maritime, l’énigme de la disparition, il y a 230 ans, de La Pérouse, le fameux explorateur français ; c’est ce qu’a révélé un anthropologue la semaine dernière.
En 1785, Jean-François de Galaup de la Pérouse était envoyé par le roi Louis XVI pour cartographier le globe et en particulier les terres qui avaient échappé à l’explorateur britannique James Cook.
Trois ans plus tard, l’explorateur français et son équipage de 250 marins ont fait naufrage après avoir repris la mer depuis Botany Bay en Nouvelle-Hollande —à présent en Australie — en direction de la Nouvelle-Calédonie. Les épaves des deux frégates ont été retrouvées au large de la minuscule île Vanikoro, qui fait partie de l’archipel des îles Salomon, au nord-est de la Nouvelle-Calédonie. Les locaux ont affirmé que les survivants avaient construit un vaisseau et repris la mer en direction de la France. Après leur départ, on pensait qu’ils avaient disparu en mer.
Un récit connu depuis longtemps mais largement ignoré
Le récit d’un marin indien rescapé, Shaik Jumaul, laisse cependant entendre que La Pérouse et ses matelots ont peut-être perdu la vie de manière beaucoup plus sanglante, à environ 2500 km de là, en retournant vers l’Australie.
Le récit de Shaik Jumaul, qui avait été rapporté dans le journal The Madras Courier en 1818 mais largement ignoré jusqu’à tout récemment, détaille le naufrage de son navire marchand au large de la côte nord australienne en 1814 ; c’est ce que nous apprend Garrick Hitchcok, anthropologue de l’Australian National University.
M.Hitchcock, qui rend compte de ses recherches dans The Journal of Pacific History, affirme que le marin indien a été abandonné sur Murray Island dans le détroit de Torres. Lorsqu’il a été secouru par une flotte marchande en 1818, il a raconté à l’équipage qu’il avait trouvé des coutelas et des mousquets qui n’étaient pas de fabrication anglaise, ainsi qu’un compas et une montre en or.
« Lorsqu’il a demandé aux habitants de ces îles comment ils avaient eu ces objets, ceux-ci ont raconté qu’environ 30 ans plus tôt, un navire avait fait naufrage sur la Grande Barrière de Corail à l’est, à portée de vue de l’île » écrit M.Hitchcock. Mais d’après les témoignages, les naufragés n’avaient pas été bien accueillis. « L’équipage avait réussi à atteindre les côtes mais dans les affrontements qui ont suivi, tous ont été tués sauf un garçon, qui a été sauvé et élevé comme l’un des leurs, et qui s’est ensuite marié à l’une des autochtones. »
D’après M.Hitchcock, ce récit de marin, qu’un livre français de 2012 mentionne brièvement mais ne retient pas sous prétexte qu’il ne serait pas fiable, pourrait bien être véridique car il correspond, sur le plan chronologique, à une tentative des survivants du premier naufrage pour rentrer chez eux : « Les historiens et les archéologues marins n’ont pas connaissance d’un autre navire européen ayant pu être présent dans cette région à ce moment-là », justifie-t-il.
La Pérouse a accosté à Botany Bay près de Sydney quelques jours seulement après qu’Arthur Phillip ait revendiqué cette terre pour les britanniques, en 1788.
M.Hitchcock espère désormais que les archéologues marins qui explorent la partie nord de la Grande Barrière de Corail autour de Murray Island à la recherche d’épaves pourront trouver des vestiges d’objets de fabrication française. Il a également déclaré qu’il allait organiser ses propres recherches sur l’île, avec l’aide des locaux.
Source : AFP
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