Après sa diffusion en avant-première au French Film Festival, l’Australie s’apprête à accueillir Knock, la très libre adaptation sur grand écran de la pièce de Jules Romains par Lorraine Lévy. Pour ce film, la réalisatrice a fait le choix audacieux d’un casting qui intègre la star française Omar Sy entourée par un bel éventail de seconds rôles. Pour le Courrier Australien, la cinéaste s’est prêtée au jeu des questions-réponses.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’adapter la pièce de Jules Romains ?
Comme beaucoup d’enfants français, j’avais étudié Knock à l’école. Cette pièce m’avait marquée, car elle est une excellente et intemporelle radiographie de notre société. Avec un personnage principal qui, pour asseoir son pouvoir, abuse de la crédulité des gens en les séduisant, en les manipulant, en leur disant très exactement ce qu’ils ont envie d’entendre. Comme le ferait un homme politique en campagne, par exemple. C’est une thématique qui, aujourd’hui, n’a rien perdu de sa force. Au contraire. J’ai trouvé que c’était un thème passionnant pour une comédie.
Prendre des libertés, c’est aussi prendre des risques… avez-vous eu peur de perdre les adeptes de l’histoire originale en la modifiant autant ?
Vous avez raison, être libre, c’est prendre des risques. Mais faire du cinéma aussi ! Le Knock de Jules Romains est sombre, cynique, méprisant. Je trouvais intéressant de faire une proposition différente, et de raconter la même histoire avec un personnage plus humain, plus sensible, avec un passé, des failles, des blessures. Un personnage qui va évoluer au fil de l’histoire pour aller à la recherche de sa part d’humanité. Je l’ai fait en concertation avec l’éditeur historique de Jules Romains, les éditions Gallimard, et avec ses ayants-droit, Mr et Mme Olivier Rony-Romains. Ils ont été séduits par cette proposition, et cette modernisation de l’œuvre originale.
Vous avez créé tout un microcosme que vous avez appelé dans une interview « le village gaulois »… qu’a-t-il de particulier et quelle image donne-t-il de la France ?
J’ai employé l’expression « village gaulois » en faisant référence à Astérix et Obélix. En fait, je ne cherche pas à « donner une image de la France »… mais plutôt, comme dans Astérix, à fabriquer un univers clos, très stylisé, à la limite du burlesque. Comme une bande dessinée.
Avec cette partition plus sombre, vous avez offert à Omar Sy un rôle à contre-emploi… a-t-il été difficile de trouver le ton juste – c’est à dire loin du type sympa auquel on est habitué et qu’on connait à l’international ?
Vous évoquiez les risques, tout à l’heure. Voilà le principal. Donner à une star comme Omar Sy un rôle différent, loin du « type sympa, cool et décontracté » auquel le public est habitué. Mais c’est un risque dont Omar et moi sommes fiers. Omar était heureux d’aller chercher d’autres émotions, d’autres couleurs de jeu, d’enrichir sa palette. Comme tous les grands acteurs. Mais je ne serais pas allé le chercher (et il ne se serait pas intéressé au rôle) si mon Knock n’avait pas porté en lui une humanité qui est au cœur du film.
Votre Knock est un cynique qui finit pas devenir un « good guy »… au fond, est-ce moral ?
Se bonifier n’est pas immoral ! Au contraire ! Oui, j’avais envie que le cynisme de Knock fonde au fur et à mesure qu’il trouve sa place dans ce village et dans le cœur de ses habitants. Ce qui m’intéresse, c’est la trajectoire du personnage. Son évolution. Et n’oublions pas que c’est une comédie avant tout.
Les Australiens vont découvrir votre Knock : qu’avez-vous envie qu’ils en retiennent ?
C’est une question difficile. Le message du film est porté par Adèle, que joue merveilleusement Ana Girardot. Ne le dévoilons pas. J’aimerais que le public Australien soit en empathie avec mes personnages, qu’il se retrouve en eux, et qu’il puisse rire de leurs travers – qui sont aussi les nôtres.
Propos recueillis par Valentine Sabouraud
Le film en résumé : ancienne canaille, le Dr Knock s’installe dans le village français de Saint-Maurice où il va appliquer des techniques modernes et redoutablement efficaces pour rentabiliser son exercice de la médecine. C’est là qu’il va rencontrer la jeune Adèle et, qu’en parallèle, son passé va remonter à la surface menaçant de faire s’écrouler tout ce qu’il a réussi à bâtir. Comédie légère et nostalgique, ce Knock a conservé quelques répliques cultes de la pièce d’origine tout en prenant de la distance avec le discours sombre et critique de Jules Romains… En somme, un film bon enfant qui profite aussi des décors naturels dans lesquels il a été tourné dans la Drôme (Châtillon-en-Diois, Glandage, Saint-Martin-en-Vercors) et en Ardèche (Saint-Jean-de-Muzols et Colombier-le-Vieux). Une superbe carte postale de la France ! |
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Knock réalisé par Lorraine Lévy avec Omar Sy, Ana Girardot, Audrey Dana, Christian Hecq, Alex Lutz et Sabine Azéma sort dans toutes les bonnes salles en Australie le 2 août prochain.
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