Il y a quelques jours, un terrible accident de voiture est survenu sur la célèbre Oodnadatta Track, une piste mythique qui s’étend de Marree à Marla en Australie-Méridionale. Pas de médecin à l’horizon, encore moins d’hôpital, c’est le Royal Flying Doctor Service (RFDS) qui est intervenu pour apporter les premiers secours aux accidentés. Depuis 90 ans, cette organisation mythique envoie avions et médecins pour garantir une aide médicale d’urgence jusqu’au cœur le plus désert de l’Australie. Forcément, on a eu envie de vous la présenter.
A l’origine, le rêve d’un homme : le pasteur John Flynn (1880 – 1951)
Né à Moliagul dans le centre du Victoria, Flynn s’intéresse à la photographie et aux premiers secours, tout en se destinant à servir l’église presbytérienne. Durant sa période de formation théologique, il se rend à plusieurs reprises dans le bush et ce sont ces premières expériences fondatrices qui le conduiront à publier « The bushman’s companion ».
En 1911, il est envoyé à Beltana, à 500 kilomètres au nord d’Adélaïde. Il prend alors conscience des difficultés rencontrées par les habitants de ces lieux reculés où il faut voyager en chameau, à cheval ou en carriole sur de très longues distance pour trouver un médecin. A la demande de ses supérieurs, il rédige ensuite plusieurs rapports sur les conditions de vie des populations blanche et aborigène dans le Territoire du Nord. Mandaté pour mettre en œuvre ses propres recommandations, il va s’employer à faire vivre son « Australian Inland Mission », installant une quinzaine de postes de soins dans les régions les plus isolées. Le premier d’entre eux profite de la présence d’une infirmière, d’un père et de cinq chameaux.
L’aéroplane et la radio, deux innovations qui vont tout changer
En 1917, Flynn reçoit une lettre qui, d’après la légende, va esquisser le cadre de ce qui deviendra le RFDS. Elle est écrite par le jeune lieutenant australien John Clifford Peel (1894-1918), pilote et étudiant en médecine, qui y explique l’intérêt du recours à l’aéroplane pour surmonter les distances qui séparent les communautés éloignées des premiers postes de soins. Hélas, Peel décèdera avant de voir se concrétiser le projet qu’il a anticipé. Son avion disparait en France pendant la guerre en 1918.
Dix ans plus tard, le 15 mai 1928, l’Australian Inland Mission Aerial Medical Service (nom originel de RFDS) est lancé. Le premier vol a lieu deux jours après ; le pilote de Qantas Arthur Affleck est aux commandes, il emmène avec lui le chirurgien Kenyon St Vincent Welsh.
Un autre Australien d’exception va contribuer à l’efficacité du système : l’inventeur Alfred Traeger (1895-1980), repéré et embauché dès 1925 par Flynn pour trouver une solution de télécommunication abordable, autonome et facile à manipuler. Après de nombreux essais, il créera la première radio à pédale (pour un coût d’achat modique de 33 livres), puis une machine à écrire en morse et, enfin, un transmetteur vocal. Les habitations de l’outback peuvent ainsi s’équiper et communiquer facilement avec les services du RFDS. Les bases de l’institution sont posées. Elles seront solides.
Succès, reconnaissance et financement…
Des sections du RFDS sont peu à peu ouvertes dans tout le pays, dans le Victoria d’abord en 1934 et jusqu’en Tasmanie en 1960. Le principe est d’avoir un pôle d’action qui rayonne partout où cela est nécessaire, mais dans un périmètre circonscrit. Des évolutions ont également lieu en termes de flotte. Le contrat passé à l’origine avec la petite compagnie Qantas de l’époque évolue et RFDS finit par acheter ses appareils et employer ses propres pilotes et techniciens. Aujourd’hui, elle fait intervenir 69 avions à partir de 24 bases en Australie. En 2017, le RFDS s’est même acheté un Pilatus PC 24 surnommé le » jet super versatile » capable de voler à 747 km /h, un nouvel atout pour le service et surtout… les patients.
J’ai tant entendu du travail du Flying Doctor Service, de la sécurité et de l’aide qu’il apporte partout dans l’outback. J’exprime mon admiration à tous ceux, passés et présents, qui ont contribué à cette œuvre magnifique. Reine Elizabeth II en 1950
Néanmoins, le financement de cette institution majeure reste délicat. Si le RFDS est subventionné par l’état et le gouvernement fédéral, il continue de faire appel à la générosité du grand public. L’argent va dans l’achat d’équipements, du défibrillateur à la couveuse, mais aussi dans le salaire des 1400 personnes qui travaillent chaque jour en son sein. Outre les interventions d’urgence dans l’outback, le RFDS propose aussi des services de télémédecine, organise le suivi de traitements en cours et organise des campagnes de vaccination, sans compter la formation aux premiers gestes de secours.
Par un phénomène assez inexplicable, cette organisation exceptionnelle qui prend soin des 8 millions de personnes qui vivent dans les régions les plus isolées du pays (touristes et voyageurs occasionnels compris) sur une surface de 7,7 millions de kilomètres carrés est connue… de 5% des élèves Australiens seulement. Une injustice à corriger de toute urgence !
Valentine Sabouraud
Il existe un musée du RFDS à Alice Springs, 8-10 Stuart Terrace, Alice Springs NT 0870. N’hésitez pas à vous y rendre. Pour en savoir plus, le site très bien fait est ici. Notez aussi que, l’année dernière, le RFDS a aidé une personne toutes les deux minutes et ses interventions ont correspondu à 34 allers-retours jusqu’à la lune !
Sources : flyingdoctor.org, adb.anu.edu.au, abc.net.au, 3squadron.org.au, adelaidenow.com.au
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