Le diagnostic du roi Charles III, atteint d’un cancer, a fait surgir la question suivante : que se passera-t-il si le souverain n’est plus capable de remplir ses fonctions royales ? Buckingham Palace a annoncé que le roi continuerait de remplir les papiers officiels et de se rendre à ses réunions hebdomadaires en compagnie du premier ministre pendant la durée de son traitement.
Mais qu’adviendra-t-il si le souverain tombe gravement malade ?
Trois options s’offrent à lui : les conseillers d’État, la régence et l’abdication.
Conseillers d’État
Tout d’abord, le roi Charles peut déléguer une (grande) partie de ses fonctions royales à des conseillers d’État. Les conseillers sont choisis parmi la famille royale, plus précisément entre la femme du souverain et les quatre premiers prétendants au trône. Au nombre de deux, les conseillers d’État travaillent ensemble et remplacent le roi dans la plupart de ses fonctions, mais pas toutes. Par exemple, les conseillers ne peuvent pas dissoudre le parlement, sauf sous l’ordre du souverain, ou exercer le pouvoir royal dans d’autres royaumes tels que l’Australie.
Régence
La régence est la deuxième option qui s’offre au roi, s’il est « incapable, en raison de faiblesse mentale ou physique, de remplir ses fonctions royales pour un moment ». Le souverain ne contrôle pas quand débute la régence ni pour combien de temps. L’Acte de régence a désigné le prince William comme régent, étant donné qu’il est le premier prétendant au trône.
L’Acte de régence ne donne pas au régent le pouvoir sur d’autres royaumes comme l’Australie ou la Nouvelle-Zélande. La Nouvelle-Zélande a résolu ce problème en ajoutant une section dans sa constitution, donnant au régent les même fonctions royales que le roi. L’Australie, quant à elle, n’a rien fait de tel. Par conséquent, un régent britannique n’aurait aucun pouvoir en Australie.
Abdication
La dernière option serait l’abdication, mais sa portée sur les autres royaumes poserait de sérieuses questions d’organisation.
Lors de l’abdication du roi Edouard VIII en 1936, une déclaration d’abdication avait été signée et l’Australie, entre autres, avait consenti à la législation promulguée, ce qui ne serait plus possible aujourd’hui, étant donné que le Royaume-Uni ne peut plus légiférer quoi que ce soit qui concerne l’Australie. Compte tenu du désordre constitutionnel qu’une abdication engendrerait, puisqu’il faudrait s’occuper du rôle du roi dans les 14 royaumes (hors Royaume-Uni) dans lesquels il est encore souverain, il est peu probable que cette solution soit adoptée.
Conséquences pour l’Australie
Si le roi Charles était dans l’incapacité de poursuivre ses fonctions et qu’un conseiller d’État ou un régent était nommé, quelles seraient les conséquences pour l’Australie ?
Les derniers pouvoirs du roi en Australie sont la nomination et le licenciement du Gouverneur général et des gouverneurs des différents États. Le mandat du Gouverneur général expirera d’ici le milieu de l’année. Si le roi Charles était alors gravement malade et dans l’incapacité de nommer un nouveau Gouverneur général, personne n’aurait le pouvoir de le faire, ni un conseiller d’État ni un régent.
À la place, le Gouverneur général actuel, David Hurley, pourrait décider de prolonger son mandat, car aucun terme officiel ne peut y être mis tant qu’il n’a pas de remplaçant.
Autrement, il pourrait démissionner et son poste serait pourvu temporairement par un gouverneur d’État en tant qu’administrateur, une pratique courante en cas de vacance dans l’administration. Si un poste de gouverneur d’État devenait vacant, le lieutenant-gouverneur, souvent chef de la justice de l’État, pourrait le pourvoir. Toutefois, si la régence persistait sur une longue période, voire des années, la situation pourrait ne pas être viable.
Il convient de se rappeler que dans le cas d’une régence, personne n’a le pouvoir de licencier le Gouverneur général. Dès lors, si une crise constitutionnelle avait lieu, tout comme en 1975 après le renvoi du gouvernement Whitlam, le Gouverneur général pourrait agir sans la perspective d’être renvoyé par le premier ministre. Cela mettrait à mal l’équilibre de la pression constitutionnelle délibérément présente dans le système et renforcerait le pouvoir du Gouverneur général tout en diminuant celui du premier ministre.
Le problème pourrait être pris en charge de la même façon que les règles de succession au trône ont été changées en 2015 pour plus d’égalité de genre. Chaque État devrait promulguer une loi demandant au Commonwealth de lui-même promulguer une loi afin de reconnaitre l’autorité d’un régent en Australie.
Bien qu’il ne soit pas essentiel de régler ce problème, il serait judicieux d’y réfléchir avant que des réelles difficultés ne surviennent.
Anne Twomey, Professor emerita, University of Sydney
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