Ses yeux pétillent autant que les paillettes qui couvrent ses paupières. Elle porte un piercing dans le nez, des Babies pendent de ses boucles d’oreille et d’immenses tatouages couvrent ses bras. Olivia Brumen, tatoueuse stylée, nous accueille dans le salon où elle officie à Richmond. Elle nous parle de son métier, avec spontanéité et technicité.
Plutôt une tendance pop
Selon une étude McCrindle publiée en 2016, un Australien sur cinq est tatoué (contre 10% en France). Un chiffre qui n’a rien de surprenant lorsqu’on observe les serveurs dans les bars, les passants sur les quais ou les ouvriers sur les chantiers. Les chaînes de télévision comme ABC2 se sont même emparées du phénomène (réality-show Tattoo Tales qui vient de se terminer). Alors, est-ce une tradition ou une mode ? « Je vois Melbourne comme un mini-New-York avec une population branchée qui aime le tatouage », déclare Olivia. D’ailleurs, les artistes convergent depuis Brisbane, Perth ou Adélaïde vers Melbourne ! Il est très banal de s’offrir une œuvre qu’on conservera à vie dans la peau ; pas forcément une démarche liée à une culture ancestrale, plutôt une tendance pop.
Les femmes autant tatouées que les hommes
Les hommes se tournent généralement vers des motifs qui couvriront largement leur bras, leur jambe ou même leur dos. Les femmes optent davantage pour des dessins discrets – une rose, une plume – sur la hanche ou le flanc. Quoi qu’il en soit, Olivia pense que les tatoués sont à 50% masculins, 50% féminins. En revanche, les tatoueurs sont majoritairement des hommes. Comment s’est-elle retrouvée dans le métier alors ? « J’ai accompagné un ami qui allait se faire tatouer. Il avait 17 ans à l’époque – ce qui était et reste illégal*, mais c’est une autre histoire. J’ai observé le professionnel et j’ai adoré. J’ai immédiatement su que c’est ce que je voulais faire. » Comme elle est passionnée de peinture et de dessin, sa voie est tracée. Y a-t-il une formation pour devenir tatoueur ? « Il existe des écoles, mais je suis dubitative. Il faut être apprenti pendant 4 ans en moyenne chez un maître avant de devenir autonome. Comment condenser ce savoir en 6 semaines de cours ? »
Un encadrement très insuffisant
Olivia aimerait d’ailleurs que le législateur encadre mieux les pratiques, car n’importe qui peut ouvrir son salon de tatouage, peu importe le savoir ou l’expérience. Résultat, Melbourne compte plusieurs centaines de ces établissements et la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Un intérieur coquet peut cacher un savoir faire approximatif. « Oui, il m’est arrivé de recevoir des clients qui n’étaient pas contents du résultat obtenu chez un autre tatoueur. » Heureusement, on peut corriger et parfois enlever un dessin au laser. Cette procédure est cependant plus efficace sur un vieux tatouage qui aura pâli. Olivia elle-même a tenté l’expérience puisqu’elle s’en est fait enlever un vieux pour en faire réaliser un nouveau, beaucoup, beaucoup plus grand sur le dos !
Messages, carpes, masques ou comics…
Les motifs sont évidemment personnels. « Certains clients donnent carte blanche, mais ils sont généralement déçus du résultat. L’idéal, c’est quand ils ont un projet en tête. Même s’il n’est pas abouti, ça aide à déterminer ce qui sera tatoué. » Olivia fait souvent des croquis pour ses clients, d’ailleurs, en dehors de ses heures de travail (cinq jours sur sept, de 9h à 17h) elle passe son temps à dessiner. Peut-elle nous dire quels sont les motifs les plus demandés ? « Les mandalas, les dessins d’inspiration japonaise – dragons, carpes, masques – des choses intemporelles. Sinon, il y a bien sûr les fans qui ont envie d’un Batman, un Elvis ou même un David Bowie, surtout depuis qu’il est décédé. » Pour les fans de Harry Potter, les reliques de la mort sont incontournables. D’autres enfin, choisissent un message qui fasse sens : une citation d’un auteur ou une phrase de leur propre cru.
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En termes d’hygiène, il faut bien sûr être prudent. Savoir que la procédure n’est pas neutre, que des réactions peuvent survenir**, « surtout avec les encres blanches ou rouges », que la cicatrisation nécessite de la discipline avec des crèmes antiseptiques, parfois un bandage. Pas de soleil. Solliciter excessivement le corps peut aussi affaiblir le système immunitaire, Olivia a entendu parler de ce type de conséquence grave. Prudence donc, et modération ! Quant à la douleur, oui, elle est là. Et les crèmes anesthésiantes ne sont pas vraiment recommandées car, lorsque l’effet s’estompe, « les sensations sont décuplées ». Alors, il faudrait oublier ce projet ? Bien sûr que non, mais faire le choix en connaissance de cause.
Faire confiance au bouche-à-oreille
Dans le salon, une cliente vient d’arriver. Elle a choisi Olivia pour faire son deuxième tatouage (le premier a été réalisé à Londres il y a 15 ans). Elle est ravie du Yin Yang stylisé qui s’étend sur son côté droit. Elle avait une petite idée de départ, que la tatoueuse a su magnifier. Elle en est à sa deuxième séance et espère bien avoir fini aujourd’hui. Elle a connu Olivia par le bouche-à-oreille : le moyen le plus répandu pour trouver LE bon artiste. A défaut, il paraît que vous pouvez toujours vérifier le compte Instagram des uns et des autres. Celui d’Olivia compte 4362 followers (en progression constante). On va s’abonner.
Valentine Sabouraud
Olivia Brumen chez Dynamic Tattoo 71 Swan st, Richmond, Vic 3121 – Compter $170/ heure. Le temps passé dépend du dessin et/ou couleur, ainsi que de la tolérance à la douleur. Pour en savoir plus, cliquez ici.
* Les underage tattoos sont interdits. ** Une étude publiée dans Scientifics Reports par une équipe de chercheurs franco-allemande a récemment montré que du dioxyde de titane, un pigment blanc, a été retrouvé dans les ganglions lymphatiques de personnes tatouées.
Légendes photo : portait d’Olivia Brumen, tatouages d’Olivia sauf dos japonais par Trevor McStay
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