Les évacuations de ressortissants étrangers se poursuivent vendredi en Nouvelle-Calédonie, où l’aéroport international restera fermé aux vols commerciaux jusqu’au mardi, malgré une visite éclair du président français Emmanuel Macron, venu prôner l’apaisement.
De nombreuses personnes sont bloquées depuis le début le 13 mai de la crise qui secoue cet archipel stratégique français du Pacifique Sud, où une vague de violences a éclaté pour contester une réforme électorale décriée par les indépendantistes, qui craignent qu’on ne « minorise encore le peuple autochtone kanak ».
La suspension des vols commerciaux en vigueur depuis le 14 mai est prolongée jusqu’à mardi 09H00 locales (22H00 GMT lundi), a indiqué à l’AFP la Chambre de commerce et d’industrie de Nouvelle-Calédonie, exploitant de la plateforme.
Les armées néo-zélandaise et australienne continuent elles leurs rotations vendredi vers l’aérodrome de Nouméa pour évacuer des centaines de touristes, selon le site internet Flightradar24.
Le gouvernement du Vanuatu a lui indiqué qu’il organisait vendredi le rapatriement de quelque 160 étudiants dans la journées, avec trois vols.
La réforme contestée dite du « dégel » prévoit d’élargir le corps électoral pour les élections provinciales calédoniennes, actuellement réservées aux natifs et aux résidents arrivés avant 1998 ainsi qu’à leurs descendants.
Les Kanak représentent plus de 41% de la population locale.
– Macron contre un « passage en force » –
En visite éclair à Nouméa jeudi, le président français Emmanuel Macron a tenu des consultations avec les loyalistes et les indépendantistes, s’engageant à ce que la réforme, approuvée par les députés, « ne passe pas en force ».
Pour être adopté, le texte doit encore être validé par les deux Chambres du Parlement réunies en Congrès.
M. Macron entend toutefois donner la priorité à un accord entre les deux camps, à trouver d’ici à la fin juin, pour qu’ensuite « cet accord puisse être soumis au vote des Calédoniens ».
Avant cette échéance politique, l' »objectif est de rétablir l’ordre dans les jours à venir », a-t-il prévenu. « Nous allons donc reprendre pas à pas chaque quartier, chaque rond-point, chaque barrage », avec entre autres « 3.000 forces de sécurité intérieure » car « ça n’est pas le Far West », a-t-il dit.
Six morts, dont deux gendarmes, et des dégâts considérables sont à déplorer depuis le début des affrontements.
Au total, 281 personnes ont été placées en garde à vue depuis le 12 mai, à une écrasante majorité pour des atteintes aux biens, selon une source judiciaire.
L’état d’urgence instauré le 16 mai prévaut toujours, avec les mesures qui l’accompagnent: couvre-feu de 12 heures quotidiennes, interdiction de rassemblement, de transport d’armes et de vente d’alcool, bannissement de l’application TikTok utilisée par les émeutiers.
Ce « mouvement d’insurrection est absolument inédit », « personne ne l’avait vu venir avec ce niveau d’organisation et de violences », a jugé le président français.
Il a promis une « aide d’urgence » pour réparer les dommages « colossaux » causés par les émeutiers, alors que les barrages continuent d’émailler le territoire.
Sur la côte est de la principale île de l’archipel, le carrefour entre la route qui en traverse le centre et celle qui longe l’océan est par exemple bloqué. Le passage n’est accordé qu’au véhicules de secours.
– « Un accord est possible » –
Dans le quartier de Montravel à Nouméa, les militants sont en attente vendredi d’une communication officielle du FLNKS, mouvement indépendantiste invité aux négociations.
« Un accord est possible si tout le monde est de bonne foi », a affirmé la cheffe de file des loyalistes Sonia Backès, sur la radio RRB.
Mais, a-t-elle prévenu, le retour au calme prendra du temps. « Les opérations qui sont menées quartier par quartier demandent des moyens phénoménaux (…) Les forces de l’ordre se font tirer dessus à balles réelles. Les barrages sont quand même très lourds à débarrasser ».
La Nouvelle-Calédonie est un territoire-clé du Pacifique Sud, qui concentre 20 à 30% des ressources mondiales en nickel, secteur qui emploie directement ou indirectement 20 à 25% des salariés calédoniens.
Cet avantage stratégique pourrait susciter l’intérêt de la Chine, a mis en garde le sénateur français Claude Malhuret, évoquant des craintes « d’ingérences » de Pékin qui « a besoin de nickel pour produire ses batteries », a-t-il expliqué à l’AFP.
Dans un message interne diffusé mercredi, l’intersyndicale de la Société Le Nickel a appelé à permettre de nouveau l’acheminement de minerai, perturbé par les mouvements de protestation, faute de quoi son avenir serait compromis.
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