L’Indonésie se montrait déterminée dimanche à procéder rapidement à l’exécution de huit condamnés à mort étrangers pour trafic de drogue, en dépit des condamnations internationales contre la peine capitale à laquelle un Français a provisoirement échappé.
Les autorités de ce pays d’Asie du Sud-Est ont formellement notifié aux huit détenus — d’Australie, du Brésil, des Philippines et du Nigeria — que leur exécution au côté d’un Indonésien était imminente.
Cependant, le Français Serge Atlaoui, condamné à mort en 2007 pour un trafic de drogue qu’il a toujours nié, a été retiré de la liste des exécutions au dernier moment, après d’intenses pressions diplomatiques de Paris.
Les neuf condamnés, qui vivent leurs dernières heures, ont été placés à l’isolement dans une prison du complexe pénitentiaire sur l’île isolée de Nusakambangan, « l’Alcatraz indonésien », accessible par la ville portuaire de Cilacap, où séjournent des proches des détenus.
La législation indonésienne prévoit que l’exécution doit être notifiée aux condamnés au moins 72 heures au préalable, signifiant que les exécutions pourraient avoir lieu dès mardi soir.
Le procureur général indonésien, Muhammad Prasetyo, a déclaré à la télévision que les préparatifs pour les exécutions étaient achevés « à 100% ». Il n’a avancé aucune date mais souligné que « le plus tôt serait le mieux ».
Ces condamnés ont récemment vu leur demande de grâce rejetée par le président indonésien Joko Widodo, intransigeant sur l’exécution des condamnés à mort pour trafic de drogue, et resté sourd aux appels à la clémence de plusieurs pays, alors que les critiques internationales se multiplient.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a exhorté samedi le gouvernement indonésien à ne pas exécuter ces condamnés qui attendent dans le couloir de la mort, rappelant l’opposition traditionnelle de l’ONU à la peine capitale.
« Selon la législation internationale, au cas où la peine de mort est en vigueur, elle ne devrait être appliquée que pour les crimes les plus graves comme les meurtres avec préméditation, et seulement en l’accompagnant des garanties appropriées », a-t-il déclaré.
« Les infractions liées à la drogue ne sont pas considérées généralement comme entrant dans cette catégorie des crimes les plus graves », a souligné M. Ban.
Interrogé dimanche sur ces déclarations, le président indonésien a refusé de réagir en indiquant qu’il s’était déjà exprimé sur le sujet auparavant, se montrant inflexible.
De son côté, le gouvernement australien a indiqué avoir été informé que l’exécution de ses deux ressortissants, Myuran Sukumaran et Andrew Chan, était « imminente ».
« J’appelle à nouveau respectueusement le président indonésien à reconsidérer son refus d’accorder une grâce. Il n’est pas trop tard pour changer d’avis », a déclaré la ministre australienne des Affaires étrangères, Julie Bishop.
Le gouvernement brésilien a également assuré qu’il poursuivrait ses efforts diplomatiques pour tenter d’éviter l’exécution du Brésilien Rodrigo Muxfeldt Gularte.
– ‘Nous avons pris note’ –
En dépit de l’intensification des pressions diplomatiques, l’Indonésie se montre intransigeante et a pointé du doigt le « deux poids deux mesures » des Nations unies.
« Nous avons pris note des déclarations de l’ONU, mais nous observons aussi qu’il n’y a eu aucune déclaration similaire lorsque deux Indonésiennes ont été exécutées récemment », a déclaré à l’AFP un porte-parole du ministère indonésien des Affaires étrangères, Arrmanatha Nasir, en référence aux deux domestiques indonésiennes décapitées en Arabie Saoudite.
Des exécutions ont eu lieu récemment « dans d’autres pays, et nous n’avons vu aucune déclaration de l’ONU », a-t-il ajouté.
Les exécutions par arme à feu imminentes en Indonésie étaient prévues initialement en février, mais les autorités avaient ensuite indiqué qu’elles attendraient la fin des recours en justice, à la suite de critiques et pressions internationales.
Alors que Jakarta a invoqué une procédure en cours devant le tribunal administratif pour retirer le Français de la liste des exécutions imminentes, l’Indonésien placé à l’isolement dans l’attente de son exécution avec les huit étrangers a lui aussi introduit un recours devant la Cour suprême, dont la décision est attendue lundi.
Les autorités ont déjà pris contact avec à sa famille il y a plusieurs jours pour demander ses mensurations, afin de préparer son cercueil.
Nick PERRY/AFP
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