Bien que la plupart d’entre nous aient une compréhension intuitive de la notion de classe sociale, il nous est souvent difficile de la définir en dehors de considérations purement financières — par exemple, les liquidités qu’on possède à la banque.
Le modèle en trois strates, qui nous classe tous dans l’une des catégories « classe ouvrière », « classe moyenne » et « classe supérieure » date du XXème siècle. Un rapport récent de l’Australian National University propose une approche plus nuancée de la façon dont on peut se positionner sur l’échelle sociale. Au final, ce ne sont pas trois mais six classes sociales qui ont été clairement identifiées en Australie. Le pays a beau se considérer très égalitaire, la réalité est tout autre.
Capital social et capital culturel
Jill Sheppard, qui a co-écrit le rapport Classe, Capital et Identité dans la Société Australienne avec Nicholas Biddle, explique en quoi son approche diffère des méthodes habituelles. « Ces vingt dernières années, la façon la plus simple et la plus fiable de mesurer les classes sociales était de se baser sur le métier, » explique-t-elle. « Par exemple : avez-vous un métier manuel ou travaillez-vous dans un bureau ? Accomplissez-vous des tâches manuelles qui demandent une qualification particulière ou peu qualifiées ? Mais selon elle, cette méthode bien que simple, occulte l’aspect social des classes, qui est beaucoup plus complexe.
Dans son étude, l’équipe du Dr Sheppard a questionné 1200 Australiens sélectionnés au hasard sur leur niveau de richesse, leurs loisirs, et les métiers des personnes qu’ils fréquentent régulièrement. Le nouveau modèle de hiérarchisation sociale qui en découle intègre tous ces aspects en prenant en compte non seulement le revenu et les économies (le capital économique) mais aussi le capital social et le capital culturel.
Le capital culturel, explique le Dr Sheppard, se définit par la manière dont vous passez votre temps libre. Si vous avez une soirée de libre, que faites-vous ? Allez-vous voir un film ? Allez-vous au théâtre ? Restez-vous à la maison pour aller sur Facebook ? Les activités sont placées sur une échelle de prestige relatif et sont un bon indicateur du niveau d’éducation et des habitudes de dépense.
De la même manière, le capital social est mesuré par le prestige — mais est aussi prise en compte la diversité. « Nous demandons aux personnes interrogées quelles sont les professions des personnes qu’elles fréquentent — famille et amis. Nous partons du principe qu’il y a une différence entre les gens qui ne fréquentent que des personnes exerçant le même métier qu’eux, et ceux qui ont un large éventail de contacts sociaux. »
Si vous fréquentez principalement des personnes qui font la même chose que vous et que cette activité se situe bas sur l’échelle de prestige alors votre score global sera inférieur.
Les 6 classes sociales en Australie
D’après le Dr Sheppard, 6 classes sociales parviennent à décrire de manière assez précise la société australienne, à la fois intuitivement et statistiquement.
Le précariat (les travailleurs précaires) : il constitue 12% de la population. Ce sont les personnes les plus affectées par la pauvreté, principalement . Elles ont les revenus les plus faibles, beaucoup sont sans emploi et vivent des aides de l’état et leurs capitaux social et culturel sont les plus bas. Il s’agit principalement d’étudiants et de retraités.
Les ageing workers (les travailleurs vieillissants) : cette catégorie a la moyenne d’âge la plus élevée (58 ans) et représente 14% de la population. La majorité sont des retraités et sont les moins susceptibles, comme les personnes de la catégorie précédente, d’avoir un emploi rémunérateur.
Les new workers (les nouveaux travailleurs) : ils représentent un quart de la population. Près de la moitié des personnes de cette catégorie, dont l’âge moyen est évidemment inférieur à celui de la catégorie précédente, occupent des emplois à plein temps. Alors que le prestige relatif de leur profession est légèrement inférieur à celui des ageing workers, ils ont plus de moyens financiers et ont de meilleurs scores en capital social et capital culturel.
L’established middle (la classe moyenne établie) : bien que son taux d’emploi à plein temps soit légèrement plus bas que celui des new workers, la classe moyenne établie « est plus installée et plus à l’aise dans son statut que les nouveaux travailleurs. » Du fait d’une plus grande accumulation de richesses, les personnes entrant dans cette catégorie ont aussi « plus d’atouts » que les nouveaux travailleurs.
L’emerging affluent (la classe supérieure émergente) : dans cette catégorie, les revenus moyens sont plus élevés que dans la classe moyenne bien établie, mais paradoxalement l’accumulation de richesses (économies, biens) est inférieure.
L’established affluent (la classe supérieure établie) : cette catégorie comprend ce qui, en Australie, se rapproche le plus d’une aristocratie : c’est parmi elle qu’on trouve les scores les plus élevés de capital social, économique et culturel.
Le mythe d’un pays sans classe sociale
Même si certains experts commencent à réfuter l’idée qu’il n’existe pas de classe sociale en Australie, les Australiens aiment à penser que leur société se fiche des différences sociales. L’idée du « fair-go», la notion d’égalitarisme, fait partie de l’identité du pays. Pour le Dr Sheppard, c’est l’héritage d’un sentiment anti-britannique historique. « Nous sommes comme leur enfant rebelle, qui veut rejeter tout ce qu’il voit en eux, » explique-t-elle. Que l’Australie se rassure : selon le Dr Sheppard, la hiérarchie sociale, bien que réelle, y est cependant moins pesante qu’en Angleterre.
Source : abc.net.au
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