C’est une affiche qui capte notre attention, une typo oblique pas tout à fait techno dans un halo dégradé qui vire du rose au violet sur un fond sombre. French Waves, est l’un des seuls films français qui passe dans le cadre du Melbourne Documentary Film Festival en juillet. Consacré à la musique électro depuis ses débuts jusqu’à ce jour, il méritait qu’on s’intéresse à son jeune réalisateur de 26 ans. Pour le Courrier Australien, Julian Starke a accepté de revenir, depuis la France, sur son parcours, son film et ses projets.
« J’ai grandi à Strasbourg. Je suis arrivé à Paris en 2009 avec une bande d’amis qui venaient d’horizons divers : mode, graphisme, musique… » Résultat, le petit groupe décide de créer un collectif : Pain Surprises. Les premiers événements qui rassemblent la communauté sont des soirées « avec des happening » comme la diffusion de courts-métrages. L’image est en effet déjà un centre d’intérêt majeur pour Julian qui se forme à ESEC. C’est d’ailleurs un film qui va déclencher son envie de s’emparer du sujet électro.
Passage de relais entre les générations Y, Y et Z
« Félix, un de mes colocataires de l’époque a été choisi pour jouer dans Eden de Mia Hanson Love. Le film revient sur les débuts de ce courant musical en France avec la French Touch. Je me suis dit qu’il serait intéressant de faire le pont entre cette génération décrite dans le film, et celle, plus récente, que je connaissais. » Julian réfléchit et propose son sujet à un producteur qui l’encourage à s’exprimer sur tous les outils à sa disposition. Du court-métrage envisagé au départ, French Waves devient un phénomène transmédia avec un documentaire de 1h10, une web-série de dix épisodes, un site internet, des talks, des soirées… Sur le long-métrage, celui qui sera diffusé à Melbourne, le dossier de presse explique qu’il s’agit de raconter le passage de relais entre les générations X, Y et Z. On pourra y voir Jean-Michel Jarre et Bob Sinclair, mais aussi Superpoze ou Fakear.
« Pour réaliser ce documentaire, j’ai évidemment regardé beaucoup de films avec des scènes de club – récemment 120 battements par minutes bien sûr – mais aussi des histoires de mort ou de disparition pour mettre en exergue cette idée de passage, de transmission. » Le film réussit ainsi à embrasser 25 ans d’histoire avec la complicité de 50 artistes et DJ.
Contestataire et radical
Comment Julian s’est-il intéressé à l’électro, ce mouvement né « dans la souffrance » à Détroit dans les années 80 ? « Je crois qu’il y a quelque chose de contestataire et radical dans cette musique. Un truc qui touche les adolescents. Quand j’étais jeune, j’écoutais Justice, je me souviens d’être allé à un de leurs concerts au Zénith de Strasbourg. Après, j’ai découvert Daft Punk et bien d’autres. » Depuis, le courant musical s’est transformé en « mode de production, également à l’origine de la house ou de la techno. » Mais attention, il n’est pas moins intéressant pour autant. Et Julian d’évoquer Rone qui joue à la Philharmonie de Paris – « il fusionne les genres » – ou Jacques qui crée de la musique live avec des objets dont il enregistre le son sur scène : « osé comme approche. » En somme l’électro évolue et résiste.
Cette longévité, selon Julian, doit beaucoup à la fascination passée des Européens. « Nous lui avons apporté cet aspect mélodique – si l’on peut dire, sachant qu’on parle de rythme – et ça, c’est la contribution de la French Touch dans les années 90. A mon sens, sans ce fantasme européen, l’électro n’aurait jamais connu un tel essor. »
Musique aborigène et pulsatile
Aujourd’hui, certains prennent du recul par rapport à la French Touch, mais on observe aussi des prises de position pour défendre une certaine idée de l’électro. Julian pense au Manifeste du label Underground Resistance qui écrit : « N’est-il pas évident que la musique et la danse sont les clefs de l’univers ? Les tribus soit-disant primitives le savent depuis des milliers d’années ! » Ce qui nous ramène à la musique aborigène et pulsatile du didgeridoo. Julian sourit de ce rapprochement, il n’y avait pas pensé, mais pourquoi pas ?
Le réalisateur est déjà venu en vacances en Australie avec sa famille dans la région de Sydney et il a aussi visité Ayers Rock. Il aurait bien aimé revenir pour présenter son film et organiser une soirée électro avec des DJ connus et pourquoi pas des talents locaux – une formule qui fonctionne bien. Ce sera peut-être pour une autre fois. En attendant, il travaille à l’écriture de son prochain long-métrage – une fiction « personnelle » dans l’univers du skate board – écoute de la musique de film, s’intéresse aux compositions de Flavien Berger dont il est « fan » et nous recommande quelques musiciens australiens : Midnight Juggernauts (de Melbourne) mais aussi Parcels dont il nous envoie le nom après coup par mail.
Valentine Sabouraud
French Waves est diffusé à 6.30 pm le 8 juillet au Howler (7-11 Dawson St à Brunswick) avec deux autres films Decks in the city et Italo Disco Legacy. Tickets ici.
Cette année, le Melbourne Documentary Film Festival programme, du 6 au 14 juillet, une soixantaine de documentaires aux thématiques variées, dont le phénoménal Kangaroo, film coup de poing dont nous avions déjà parlé là. |
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