A l’occasion de la visite de Olivier Becht, Ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger en Australie. Nous avons eu l’opportunité d’interviewer le Ministre pour faire le point sur les relations diplomatiques et commerciales entre la France et l’Australie, les différentes opportunités de partenariats et l’importance des Français de l’étranger .
Les relations commerciales entre la France et L’Australie ont-elles été fortement impactées par l’annulation du contrat d’achat des sous-marins français ? Comment ont elles évolué depuis cet épisode ?
La France a observé avec satisfaction les démarches entreprises par le nouveau gouvernement australien pour reconstruire sa relation avec la France et assumer auprès de Naval Group les conséquences de l’annulation du contrat d’achat des sous-marins français. Le Premier ministre Albanese a affirmé l’importance de la relation entre nos deux pays en ces temps très troublés, et je peux vous assurer que la France est très attachée à sa solide et ancienne amitié avec l’Australie. J’ai rencontré mon collègue Don Farrell, afin de lui confirmer notre intention de travailler conjointement sur tous les sujets où nous pouvons renforcer nos échanges commerciaux et nos investissements mutuels.
Les liens économiques entre nos deux pays sont très forts et ont particulièrement bien résisté ces dernières années. Quelque 600 entreprises françaises sont présentes en Australie, représentant près de 60 000 emplois dans le pays, et elles font part de leur confiance quant à leur avenir sur le marché australien. Les perspectives pour 2022 et à moyen terme sont également encourageantes. Une série de grands contrats industriels ont ainsi été signés récemment tel que le renouvellement de la flotte des trams de Melbourne remporté début 2022 par Alstom ou les contrats d’Airbus avec Quantas. La National Australia Bank a par ailleurs transféré son siège européen à Paris et la banque d’investissement Macquarie ouvre cette semaine un bureau parisien : je m’en réjouis.
Nous n’oublions pas que 140 entreprises australiennes sont implantées en France et y emploient 40 000 personnes.
Les relations avec l’Australie ont été refroidies ces derniers temps, la nomination récente d’un nouveau gouvernement en Australie semble favoriser un nouvel élan,… votre visite en est l’illustration. Quels sont les différents secteurs identifiés comme des opportunités de partenariat futur France – Australie.
Si les relations entre l’Australie et la France ont pu se refroidir, , la volonté commune de nos deux gouvernements est de reconstruire la relation très ancienne qui nous lie. Je suis d’ailleurs le premier ministre français à me rendre en Australie depuis l’annulation du contrat d’achat des sous-marins français, pour bâtir de nouveaux partenariats.
La visite du Premier ministre Albanese à Paris, quelques semaines après son élection, a été accueillie en France avec beaucoup d’enthousiasme. La volonté, co-exprimée par Anthony Albanese et Emmanuel Macron, est de reconstruire la relation forte, notamment économique, qui nous lie, basée sur le respect et la confiance mutuels. Le Président de la République française se rendra d’ailleurs en Australie prochainement .
Les deux dirigeants se sont mis d’accord, à Paris, sur la mise en place d’un nouvel agenda de coopération, qui repose sur trois piliers : la défense et la sécurité ; l’action climatique ; la culture et l’éducation. L’un des axes centraux de nos échanges avec l’Australie dans les années à venir sera celui de la transition écologique.
Nous souhaitons construire des partenariats permettant de développer une nouvelle filière liée à l’extraction et à la valorisation des métaux critiques. Dans ce domaine, l’Australie a un rôle clé à jouer, étant donné les ressources dont elle dispose. L’Australie offre également des opportunités immenses sur le développement de l’hydrogène vert, essentiel à la décarbonation de l’industrie.
Côté français, nous pouvons notamment apporter l’expertise de notre écosystème présent sur toute la chaîne de valeurs des énergies renouvelables, de la recherche et développement et la coopération scientifique à la distribution en passant par la production et le stockage. Nos entreprises sont d’ailleurs déjà très présentes en Australie dans ce domaine. Elles le sont également dans le secteur de la mobilité urbaine et contribuent aux projets de constructions de tramway et à leur exploitation par exemple.
Par ailleurs et au-delà de ces sujets, nous avons pour ambition d’agir ensemble dans la région indo-pacifique, et pour la région indo-pacifique. Depuis 2018, notre pays a défini une ligne d’action relative à la zone indopacifique, centre de gravité stratégique et un des moteurs de l’économie mondiale. Les enjeux économiques, technologiques et environnementaux y sont de taille. Les défis multiples. Ils nous concernent au premier plan puisque la France est l’un des pays présents, à travers ses outre-mer, dans ce vaste espace. Richard Marles, premier ministre adjoint australien, ministre de la Défense, soulignait à juste titre à l’occasion de sa visite en France, le mois dernier, les points forts de notre alignement stratégique commun : à l’ouest de l’Australie, s’étendent les territoires français de La Réunion et de Mayotte ; à l’est, dans le Pacifique, se trouvent la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française. La France est l’un des plus proches voisins de l’Australie et la frontière française la plus étendue est celle, maritime, qu’elle partage avec l’Australie.
Depuis votre nomination en tant que « Ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français à l’étranger », quelles ont été les lignes directrices à suivre concernant les relations avec l’Australie et plus globalement avec les pays de l’Axe Indopacifique?
Il était important pour moi d’effectuer ce premier grand déplacement en Australie. Cette visite s’inscrit clairement dans l’esprit de reconstruction de la relation entre nos deux pays. Les enjeux liés à la zone indo-pacifique sont nombreux et stratégiques, en particulier dans le contexte international troublé que nous connaissons : nous sortons d’une pandémie, l’invasion de l’Ukraine par la Russie provoque une crise de l’énergie majeure, et l’équilibre mondial est redessiné.
La France et l’Australie ont une responsabilité partagée car ce sont deux démocraties présentes dans la région, avec des valeurs communes. Elles doivent proposer des réponses à l’urgence climatique – les forêts de nos deux pays ont fait les frais du réchauffement climatique – et aux défis sécuritaires, en défendant la paix et la sécurité dans la région.
La dimension économique de notre relation est évidemment importante, car nos réponses environnementales et sécuritaires communes impliquent des échanges et des investissements mutuels.
C’est pour cela que j’ai rencontré et vais continuer à rencontrer de nombreux décideurs publics au cours de mon déplacement : mon homologue au sein du gouvernement fédéral, Don Farrell, mais aussi à Sydney, des ministres de New South Wales.
Je rencontre également des représentants d’entreprises françaises implantées en Australie, dans de nombreux secteurs, notamment ceux liés à la transition énergétique. Nous devons, France et Australie, participer à la diversification des chaînes d’approvisionnement.
La crise sanitaire aura réveillé les consciences sur notre dépendance extérieure, le déficit extérieur ne cesse de grandir. Quelles sont les stratégies mises en place aujourd’hui pour inverser cette tendance?
La crise sanitaire a en effet révélé nos interdépendances. La priorité pour la France est de reconstruire une souveraineté industrielle et numérique. Je souhaite, au fond, mettre en œuvre une diplomatie économique offensive au service du pouvoir d’achat et du plein emploi en France. Cette diplomatie économique doit d’abord soutenir la ré-industrialisation dans tous nos territoires, notamment dans le cadre de France 2030. Nous devons diversifier nos fournisseurs et nos chaînes d’approvisionnement, nouer des accords commerciaux, tout cela avec nos partenaires stratégiques, et attirer tous les investissements et les talents dont nous avons besoin. Ces actions seront clefs pour le renforcement de notre souveraineté et le succès de notre transition écologique et énergétique. Ce travail, nous voulons le faire avec l’Australie. Nos deux pays entretiennent des relations historiques et étroites et le potentiel pour renforcer ensemble la résilience de nos économies respectives est très important.
Vous avez succédé à Franck Riester, ancien Ministre chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité. La mention « et des Français à l’étranger » n’était alors pas encore présente lorsqu’il exerçait cette fonction. Pourquoi a-t-elle fait son apparition au moment de votre nomination ?
Cette compétence était, dans le gouvernement Castex, exercée par M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il y a une vraie logique à ce que le ministre chargé du commerce extérieur et de l’attractivité soit aussi celui des Français de l’étranger : nos Français de l’étranger, formidables ambassadeurs au quotidien de notre culture, sont les porte-drapeaux de nos valeurs et de nos savoir-faire. Ils sont souvent, par leurs engagements professionnels, de véritables vecteurs du rayonnement économique français dans le monde. Cette partie de mon portefeuille est tout à fait essentielle à mes yeux.
Mes déplacements à l’étranger me permettront d’aller à la rencontre de nos compatriotes installés à l’étranger et d’échanger directement avec eux, partout où cela sera possible. Après deux années très difficiles pour eux, marquées par la crise sanitaire et des confinements très stricts dans de nombreux pays, la feuille de route confiée par la Première ministre Elisabeth Borne est très claire : il nous faut encore améliorer l’accompagnement des Français de l’étranger, notamment en poursuivant les projets de modernisation et de simplification des démarches administratives et consulaires, mais aussi renforcer les relations avec les élus qui les représentent.
Le programme de la visite du Ministre Becht en Australie ce lundi 19 et mardi 20 septembre 2022
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