On la contacte sur un malentendu. Invitée dans le cadre d’un événement organisé par Melbourne University sur le thème « Comment faire lire les enfants dans un monde digitalisé »… Michelle de Kretser explique qu’elle n’a aucune piste à recommander. De fait, la conférence est scindée en deux parties : la première consacrée à l’écrivaine, la seconde « en bonus » à la pédagogie d’apprentissage de la lecture. Changement d’angle, on décide donc de parler francophilie et littérature avec la célèbre auteure australienne d’origine sri-lankaise.
Elle parle couramment français, mais restera modeste, ne prononçant que quelques mots épars dans ses réponses en anglais. Pourtant, elle a étudié la langue de Molière à Melbourne University et elle a même vécu quatre ans en France. A Montpellier, elle a été assistante d’anglais dans un lycée ; et à Paris, elle a étudié à la Sorbonne avant de prendre la tête du bureau du Lonely Planet dans la capitale. Une incursion dans le monde de l’édition où elle était « en contact avec les traducteurs, les imprimeurs… »
Mais comment lui est venu le goût du français, au départ ? « Jeune j’ai été inspirée par une professeure – allemande, contre toute attente. Elle était à peine plus âgée que nous, passionnée et enthousiaste. Elle nous a initiés, mes camarades et moi, à la culture, à la littérature, à la gastronomie aussi en nous parlant de déjeuner chez Chartier par exemple, une référence peu commune. » La jeune femme lit aussi beaucoup d’auteurs dont les livres ont Paris pour cadre. Elle évoque Hemingway parmi d’autres. Et chez les écrivains français, elle cite Gide, Camus ou Baudelaire. « J’adorais les langues – y compris leur grammaire – et j’étais douée » reconnaît-elle. La trajectoire a donc été logique pour la jeune femme.
Auteure de cinq romans pour lesquels elle a reçu de nombreux prix (le Miles Franklin Award notamment), Michelle de Kretser ne se sent pas écrivaine pour autant. « Je suis avant tout une lectrice » insiste celle qui a été publiée pour la première fois à quarante ans.
Dans son dernier opus, The Life to come, l’un de ses personnage est français : peut-on y déceler un clin d’oeil à notre pays ? « En réalité, j’ai voulu parler du massacre des Algériens en 1961 : un pan de l’histoire française que j’ignorais totalement avant de voir une émission sur Arte à ce sujet en 1993. En tant que narratrice, j’aime creuser les histoires cachées. » Le massacre des Aborigènes en Australie est d’ailleurs un autre des sujets qu’elle a abordés et sur lequel elle reviendra sûrement.
Pour écrire, il faut lire
En période d’écriture, Michelle de Kretser se plie à une routine stricte de cinq cents mots par jour. Cette discipline peut-elle fonctionner pour les jeunes écrivains en devenir ? « Je ne sais pas, mais mon conseil est le suivant : pour écrire, il faut lire. » La lecture, il en sera question au Forum de la francophonie auquel elle participe ce jeudi à 18h, l’occasion de l’interroger plus avant sur ce thème. En attendant, l’auteure accepte de nous livrer les noms de six écrivains qu’elle admire particulièrement : Patrick White (en photo), Shirley Hazzard et Fiona McFarlane chez les Australiens. Flaubert, Proust et Simone de Beauvoir chez les Français. De notre côté, on inclut Michelle de Kretser dans notre liste de plumes à suivre. Deux de ses livres sont d’ailleurs traduits en français : L’affaire Hamilton et Dérives des continents.
Valentine Sabouraud
* The Rose Grower, The Hamilton Case, The Lost Dog, Springtime, Questions of Travel + The Life to come sorti en 2018
Rencontres avec Michelle de Kretser :
Jeudi 30 août à 18h à Melbourne University dans le cadre de Forum de la francophonie (réservations ici) et samedi 1er septembre à 16h à Deakin Edge dans le cadre du Melbourne Writers Festival (infos là).
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