The Australian relance le débat sur la loi sur les actes de discrimination en vigueur en Australie. Le dernier numéro de Charlie Hebdo pourrait tomber sous le coup de la loi australienne.
Ce mercredi 14 janvier, le journal libéral, appartenant au groupe Murdoch, n’a pas hésité à publier un musulman australien posant avec la couverture du dernier Charlie Hebdo caricaturant le prophète Mahomet avec la pancarte “tout est pardonné”.
Le journal publient depuis une semaine de nombreuses caricatures dans son journal et entend à présent relancer le débat sur la révision de la loi « article 18c » du Racial Discrimination Act, qui interdit d’offenser, d’insulter ou d’humilier quelqu’un sur la base de sa race, avec des exemptions pour l’art public ou la discussion raisonnable sur base de la bonne foi *.
Cette loi rend potentiellement illégale la publication d’une partie des caricatures de Charlie Hebdo en Australie. Justin Quill, avocat cité par The Australian, a confirmé qu’un journal australien qui publierait les dessins de Charlie, pourrait être condamné si une action en justice était entamée.
Vers une nouvelle tentative de modifier cette loi ? Pas vraiment…
Le Commissaire australien aux Droits de l’homme, Tim Wilson, a demandé une nouvelle révision de cette loi, qui porte (selon lui) atteinte directement à la liberté d’expression.
Le gouvernement Abbott avait déjà tenté de réviser l’article 18C l’an dernier mais les minorités, notamment Aborigènes, souvent victimes de discrimination s’y étaient opposées. En août dernier, M. Abbott a donc rompu sa promesse électorale d’abroger l’article 18C de la loi sur la discrimination raciale, qui avait été utilisée pour poursuivre le chroniqueur de NewsCorp, Andrew Bolt, pour des commentaires provocateurs sur les Aborigènes.
Le Premier Ministre Abbott prend encore position: « Je préférerais que la loi 18C soit modifiée mais nous avons dèjà fait une tentative de la modifier, et celle-ci a généré beaucoup de divisions dans la communauté. Je crois malgré tout que nous avons une bonne liberté d’expression dans ce pays même sans cette réforme « .
« J’ai assez bien aimé cette caricature » Tony Abbott
« Vous savez la chose vraiment encourageante – si nous pouvons tirer des encouragements sur les récentes tragédies à Sydney et à Paris – est que de plus en plus de musulmans semblent dire “regardez, il y a une valeur dans la diversité, nous devons adopter la position du vivre et laisser vivre”.
J’ai vu Keysar Trad sur la première page de The Australian ce mercredi matin. J’ai assez bien aimé cette caricature. Je ne suis pas sûr que j’aurais aimé tout ce que Charlie Hebdo produit mais c’est une caricature du prophète Mahomet avec une larme coulant sur son visage qui dit que tout est pardonné. Cet esprit de pardon est ce que nous devons de plus en plus voir dans ce monde moderne rancunier », affirme le Premier Ministre.
Pour…
Trad et le défenseur de réfugiés Jamal Daoud ont déclaré hier qu’ils étaient en désaccord avec la représentation de Mohammed mais ils ont exprimé leur soutien au droit du magazine de publier ce qu’il voulait, indépendamment de ce que les gens pourraient penser.
Charlie Hebdo est tristement célèbre pour avoir offensé de nombreux groupes ethniques et religieux avec ses caricatures. « Les caricatures peuvent être offensantes pour certains musulmans mais, depuis des années, le magazine faisait la même chose avec les autres religions », a déclaré hier M. Trad.
Contre…
Iqebal Patel, un ancien président de la Fédération australienne des Conseils islamiques, a critiqué la caricature de Charlie Hebdo. Il a également mis en garde les musulmans contre les actes de violence dans la défense du prophète, mais a déclaré: « les communautés et les démocraties doivent aussi agir de façon responsable afin que vous ne donnez pas l’impulsion à de telles actions terroristes ».
« Mon opinion personnelle est qu’il est insultant de se moquer du Prophète, de Jésus ou autres. Vous pouvez certainement inciter la population à se poser des questions mais soyez responsables dans la façon dont vous faites cela. Il pourrait y avoir d’autres façons d’essayer d’amener les gens à penser mais l’usage d’une caricature apporte, selon moi, peu de valeur au débat », a déclaré Patel à ABC Radio.
Sources: The Australian, Australia-Australia
* Il est interdit pour une personne d’agir, autrement que dans un cadre privé, si : (a) il y a de fortes probabilités que l’acte soit, dans toutes les circonstances, pour offenser, insulter, humilier ou intimider une autre personne d’un groupe et ; (b) l’acte est réalisé dû à la race, la couleur de peau ou les origines ethniques et nationales de l’autre personne ». Extrait de l’article 18C du Racial Discrimination Act.
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