Cela fait un siècle que William Boase a perdu la vie dans la sanglante bataille des Dardanelles mais la famille du soldat australien n’a jamais abandonné l’espoir de lui offrir une sépulture digne de ce nom.
Deux passionnés d’Histoire croient avoir localisé les sites possibles de deux fosses communes contenant les restes de 143 soldats australiens sur la péninsule de Gallipoli et des appels sont lancés pour demander aux autorités des recherches.
« Il y a beaucoup de pressions de la part de ceux qui se disent +Ils sont en paix, pourquoi faire quoi que ce soit? », dit Allan Grant, petit neveu du soldat Boase. « Moi, j’ai toujours dit que ma famille n’a jamais été en paix ».
La bataille des Dardanelles, qui a débuté le 25 avril 1915 pendant la Première guerre mondiale, s’est terminée par la défaite des forces alliées face aux troupes ottomanes. Parmi elles, plus de 11.500 soldats du Corps d’armée australien et néo-zélandais (Anzac) ont été tués sur la péninsule qui fait aujourd’hui partie de la Turquie.
Beaucoup avaient été enterrés à la hâte là où étaient tombés, d’autres ont été inhumés en temps de paix par la Commission des cimetières de guerre du Commonwealth.
John Basarin, de l’association Les Amis de Gallipoli et Lambis Englezos, retraité de l’enseignement de Melbourne, ont mené des années de recherches, guidés par les journaux de deux soldats qui avaient enterré des dizaines de leurs camarades.
« Je crois que nous avons l’obligation morale de retrouver nos morts », dit Lambis Englezos, dont les recherches avaient contribué à localiser en 2008 les tombes de plus de 200 soldats morts pendant la Grande Guerre dans la localité française de Fromelles. « Vous pouvez interroger n’importe quelle famille des soldats de Fromelles ».
Les deux soldats racontent dans leur journal comment après la seconde bataille de Khritia, au cours de laquelle les Australiens avaient pour mission de renforcer les positions britanniques, ils ont profité du couvert de la nuit pour récupérer les corps des victimes et les enterrer dans deux fosses communes.
– Honorer une promesse –
Le capitaine Percy Lay écrit ainsi: « Cette nuit là, nous avons tenté d’enterrer une partie de nos morts. Nous en avons inhumé 57 dans une tombe ». Le soldat Herbert Lloyd raconte lui qu’une équipe « a enterré 86 personnes dans une seule fosse ».
Certaines descriptions géographiques ont aidé Lambris Englezos et John Basarin à resserrer le champ des sites possibles. « Le terrain était très plat mais il y avait un dénivelé, et c’est là qu’ils les ont probablement enterrés », explique par exemple le retraité.
Pour Allan Grant, enterrer dignement le caporal Boase, tombé à Krithia, lui permettrait d’honorer une promesse faite à sa grand-mère.
« Elle n’avait que sept ou huit ans quand son frère est parti. Il n’avait que 19 ans mais pour elle, c’était un héros. De l’enfance jusqu’aux dernières années de sa vie, sa plus grande préoccupation était qu’on ne savait pas ce qui lui était arrivé ni où il se trouvait ».
John Basarin, qui est né en Turquie, s’est rendu pour la première fois à Gallipoli alors qu’il avait 10 ans. Il dit que le gouvernement australien a été informé de la possible localisation des fosses communes mais qu’il n’a rien fait de ces informations.
Allan Grant a visité deux fois la péninsule. Il espère qu’une enquête sera ouverte.
« Le gouvernement va dire que c’est trop difficile, ce qu’ils avaient dit aussi de Fromelles. Le site a seulement la taille d’un court de tennis, ça ne serait pas trop dur de creuser un peu et de vérifier s’il y a quelque chose ».
Sa famille a été déchirée par la mort de son grand-oncle, dit-il. Le père du soldat avait tenté en vain de se faire enrôler dans l’armée alors qu’il était déjà âgé d’une cinquantaine d’années avant de finir à Londres où il a construit des abris anti-aériens. Le frère aîné de la famille s’était enrôlé lui aussi et s’il était rentré à la maison, il était abîmé par la guerre.
« Cette famille Boase a vécu des choses extraordinaires pendant la Première guerre mondiale, mais ils ne sont que le reflet de ce qui est arrivé à tant de familles », poursuit-il. Toutefois, « ils n’allaient pas oublier, ils n’allaient jamais oublier ».
AFP/Madeleine COOREY
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